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Éditorial de la Présidente : Le goût des unes et des autres

Ce titre, un tantinet énigmatique, s’éclaire à la lecture d’un récent appel à contributions ainsi formulé par une revue scientifique : « genre et l’alimentation de l’Antiquité à nos jours ». Il s’agit, tout simplement, de déterminer et mesurer la part du masculin et du féminin dans les pratiques alimentaires, en tous lieux et à travers les temps historiques. On sait que ce thème fait déjà l’objet d’âpres discussions au sein des spécialistes de la préhistoire : les uns penchant pour des dames néandertaliennes et sapiens cantonnées à l’entrée des grottes pour y préparer la cuisson des gibiers des chasseurs masculins de la tribu.

Les autres plaidant en faveur d’une participation armée des femmes lancées à la poursuite des mammouths, prêtes à les sacrifier et à les découper à coups de silex bien aiguisés sur des pierres. Bien plus près de nous, le partage des tâches semblait évident : d’un côté, les cuisinières du quotidien chargées du ravitaillement ou de la cueillette des fruits et légumes, puis de leur préparation, de leurs accommodements et de l’entretien des feux de cuisson jusqu’au moment des repas où elles se transforment en servantes, quitte à rester debout, puis à desservir et à se consacrer au nettoyage de la vaisselle, à son rangement et sa prochaine utilisation pour le repas suivant. Les temps ont changé et cette distribution des tâches a cessé d’être opérante : tel est le constat fait par l’appel d’offre sur le « genre et l’alimentation ». Mais la distinction féminin/masculin en termes de nourriture et d’alimentation ne s’arrête pas aux pratiques culinaires : elle s’étend aux menus, aux rations, aux régimes, aux interdits, à la gourmandise, à l’ascétisme, aux jeûnes, aux restrictions…Soit un inventaire inépuisable où le goût n’est pas oublié avec, en conclusion, cette affirmation de Jean-Jacques Rousseau soumise à votre méditation : « Le laitage et le sucre sont un des goûts naturels du sexe (féminin) et comme le symbole de l’innocence et de la douceur qui font son plus agréable ornement » !

Anne-Marie Cocula

Présidente de l'IGNA